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théorie politique

une analyse de l'après 7 janvier. Non à l'union sacrée.

Publié le 19 Janvier 2015 par Philippe Bourrinet

AUCUNE ADHESION A L’UNION SACREE QU’ELLE QU’ELLE SOIT!

Face à la peur, lutte de classe internationale contre le Capital et ses prisons nationales!

Le massacre crapuleux, le 7 janvier 2015, de caricaturistes et journalistes de l’hebdomadaire Charlie Hebdo par un commando d’islamistes «radicaux», celui de policiers, et celui, purement raciste, de juifs, ont suscité une indignation plus ou moins générale. À l’exception de certains jeunes se crispant sur «leur» appartenance «islamo-communautariste».

Il y a eu certes d’abord d’innombrables manifestations spontanées, traduisant une immense émotion chez une génération de post-soixante-huitards pour qui ce massacre a été ressenti comme un massacre des anciens idéaux contestataires de leur jeunesse. Une émotion aussi chez les jeunes qui se doutent que toute ombre de la guerre à leurs portes les concerne directement.

Alors l’appareil politique de la bourgeoisie français a saisi les «balles au bond» et en a appelé à une vaste journée de «mobilisation nationale contre le terrorisme», «pour la liberté d’expression », en décidant de rendre gratuits les transports pour en faire une «marche sacrée pour la République».

Ainsi quatre millions d’atomes individuels, appelés à se regrouper sous la bannière nationale et au son de la marseillaise, ont manifesté le dimanche 11 janvier dans toute la France pour la «liberté d’expression», contre le terrorisme, et pour l’unité nationale de tous les «citoyens», musulmans, catholiques, juifs, ouvriers comme bourgeois, de la gauche à la droite. Tous avaient répondu «présent !», y compris les antisémites professionnels qui secrètement approuvaient les attentats contre une supérette juive, mais réclamaient plus de police et plus d’armée

Une masse amorphe de «citoyens» est accourue pour exprimer sa profonde peur devant la situation, dont la classe dirigeante lui cache soigneusement les enjeux. Certains criaient «vive la police», allant jusqu’à embrasser ses représentants munis de matraque. Alors que naguère les ouvriers en grève, mais aussi les manifestants de causes diverses comme les écologistes affrontaient les CRS et la gendarmerie, que certains y laissaient leur vie, comme le jeune Rémi Fraisse, toute la classe dominante regroupée autour de son Etat demandait la «concorde» et l’«Union sacrée», l’«oubli» de sa répression et l’adhésion à ses desseins bellicistes.

Jamais depuis la «victoire» du 11 novembre 1918 ne s’était affirmée une aussi «touchante» unité patriotique, où tous les députés de la gauche à l’extrême droite, la larme à l’œil, communiaient dans une même messe patriotique par le chant sanguinolent de la Marseillaise, celui de toutes les guerres du Capital : « Qu’un sang impur abreuve nos sillons ».

L’État français a proclamé qu’il était en «guerre contre le terrorisme», pour la «civilisation» contre la «barbarie», ignorant superbement les 2.000 victimes de la secte islamique au Nigéria. Des «Noirs», même chrétiens, potentiels immigrés, comptent à vrai dire moins que des nationaux tricolores

La campagne «Je suis Charlie», qui se présente comme une campagne pour la «liberté d’expression», ne peut faire oublier que naguère au temps de la guerre d’Algérie étaient interdits des journaux dont certains caricaturistes (les mêmes assassinés le 7 janvier) dénonçaient la torture chère à l’armée française. Il en sera de même demain si venaient à être publiés des articles et des caricatures contre la guerre et les inévitables exactions de l’armée, présentées comme d’inévitables «dégâts collatéraux».

L’État français, par la bouche de son président, a parlé : il y aura bien la guerre sur des «théâtres extérieurs». Le porte-avions Charles-de-Gaulle interviendra dans le Golfe, officiellement contre L’Etat islamique Daech. En réalité, la secrète raison de cette «présence» n’est pas la «lutte contre le terrorisme», mais bien la préservation des intérêts impérialistes occidentaux ou locaux, vu l’instabilité de la région, dans une zone stratégique non seulement pour sa production pétrolière mais pour sa proximité avec l’Asie, où le centre de gravité du capitalisme est en train de basculer. Toutes ces mesures de préparation militaire n’empêcheront ni le développement du terrorisme «islamiste» qui fait partie de la stratégie des micro-impérialismes de cette région, ni la généralisation de guerres locales incontrôlables, qui frappent dorénavant à nos portes, avec le conflit entre l’Europe et la Russie par Ukraine interposée.

Le renforcement de la police, qui vise «l’islamisme radical», a une autre cible, le véritable «ennemi intérieur» du Capital et de son Etat national : la classe des travailleurs, des prolétaires, des sans-travail, de tous ceux que le Chef du Capital français aurait qualifié de «sans dents», tous les damnés de la Terre. Un chômage massif de quatre millions de travailleurs, une crise économique sans issue ne laissent aucun autre choix à ces «sans dents» : soit de capituler en adhérant à l’Union sacrée pour sombrer finalement dans le plus profond désespoir, soit de monter sur la scène de l’histoire comme classe porteuse d’un véritable projet révolutionnaire.

Prolétaires ! Travailleurs manuels et intellectuels ! On vous martèle tous les jours depuis des décennies que vous n’êtes plus une classe, que vous n’existez plus; qu’après tant de fermeture d’usines, votre classe aurait «disparu» dans la tourmente de la mondialisation. On vous somme de faire serment d’allégeance à votre «patrie», on vous demande d’être une non-classe, de crier dans la rue : «je suis charlie», aux côtés de petits-bourgeois et de bourgeois qui n’ont qu’une idée en tête : vous museler, et si nécessaire vous mettre hors la loi si vous allez trop loin sur le terrain de vos revendications de classe.

Prolétaires ! Travailleurs manuels et intellectuels! Vous êtes avant tout une classe internationale dont le combat déborde le cadre de votre «patrie» capitaliste dont les intérêts sont antagonistes de ceux du Travail.

Vos ennemis ne sont pas les étrangers immigrés qui viendraient vous «voler votre pain» et vous imposer leur «religion», comme le proclament tous les nationalistes qui, de Pegida en Allemagne au Front national en France, essayent de vous mobiliser électoralement et dans la rue.

Vos ennemis sont innombrables : ce sont tous les Etats nationaux existants ou en cours de formation (comme Daech), ce sont toutes les religions, et pas seulement «l’islamisme radical», tous ceux qui essayent de vous convaincre que vous devrez vous battre pour la «patrie», les «droits de l’hommes», ou «la civilisation contre la barbarie».

Pour mettre fin à cette crise sans fin du capitalisme, qui enfonce inexorablement le monde dans la terreur, dans des guerres à répétition, au Proche-Orient comme aux portes de l’Europe, vous n’avez pas d’autre choix que de démontrer dans l’action votre appartenance de classe. Il n’y a pas d’autre perspective de sortie de la crise mortelle du capitalisme que celui de la formation d’une véritable communauté mondiale, dont le dessein sera la satisfaction réelle des besoins de l’immense majorité, et non la recherche effrénée du profit pour une infime minorité de possédants.

Le réveil de votre classe passe par la formation d’organismes politiques autonomes de réflexion et de lutte, dont vous ne pouvez faire l’économie pour opérer une transformation radicale et irréversible du monde. Cette perspective d’une société mondiale d’égalité et de liberté, une société unifiée et pacifiée, sans nations, sans terreur, sans terrorisme et sans guerres, vous en êtes les porteurs.

Aux caquètements de l’individualisme petit-bourgeois : «Je suis Charlie», ou du populisme : «nous sommes le peuple», comme en Allemagne, vous devez répondre dans la lutte sociale : «nous sommes une classe»; «notre seul peuple c’est la Terre entière»; «nous sommes à nos postes» pour combattre et mettre un terme à un système qui mène l’humanité toute entière tout droit au néant. Le 16 janvier 2015, Karlchen.

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