Introduction de Pantopolis (8 février 2023)
Nous publions bien volontiers cette analyse de la tendance communiste internationaliste (TCI) sur la guerre en Ukraine et la marche en avant de la bourgeoisie internationale vers la troisième guerre mondiale.
Nous manifestons, cependant, une fois de plus (voir notre article publié en avril 2022 sur Pantopolis), notre DESACCORD sur l'initiative NO WAR BUT THE CLASS WAR (NWBCW), reprise par la TCI elle-même au début de l'année 2022. Celle-ci nous semble confuse et authentiquement activiste, sans autre résultat que de brasser en vain du vent et d'éviter tout réel débat, sans aucune concession, sur les réelles perspectives révolutionnaires.
Nous ne sommes certes pas "léninistes", mais il est prophylactique de rappeler ce fameux mot de Lénine, depuis 1903 et pendant la guerre de 14-18 : "avant de s'unir, il faut se diviser"...? Ce qui signifie : sans principes clairs et intransigeants, pas de réelle préparation révolutionnaire. Ce point de vue était implicitement partagé par Karl Liebknecht lui-même au début de la révolution en Allemagne : "Il faut être clair sur le chemin à prendre et l'objectif" (Discours devant le 53e Comité de la Marine, Berlin, 27 novembre 1918, in Gesammelte Reden und Schriften, vol. 9, p. 613-625).
De même, sans condamnation ferme des propos et agissements d'une certaine secte, malfaisante, qui passe son temps à calomnier les éléments internationalistes, en trempant sa plume dans la merde des fosses d'aisance contre-révolutionnaires, il n'y aura pas de réel assainissement du milieu prolétarien internationaliste.
(Ce texte, diffusé en pdf sous forme de tract, est précédé d'un appel à l'extension des luttes lors des manifestations en France contre la "réforme" des retraites, une attaque directe contre le prolétariat en France.)
Pantopolis
tract en pdf de la TCI sur les grèves et manifestations en France et la guerre en Ukraine
La bourgeoisie mondiale sur le sentier de la guerre
Il y a maintenant un an, la Russie a pris l’initiative d’envahir l’Ukraine, ramenant la guerre au cœur de l’Europe. Mais qu’on ne s’y trompe pas : contrairement à la propagande qui nous est assénée, cette initiative n’est pas plus le produit de la folie personnelle de Poutine, que la réponse de Biden ou Macron n’est guidée par la défense de la «démocratie» ou le secours aux populations civiles. SUR LE SOL UKRAINIEN S’OPPOSENT EN FAIT LES INTÉRÊTS STRATÉGIQUES INCONCILIABLES DE GROUPES D’ÉTATS, MENAÇANT L’HUMANITÉ D’UNE ESCALADE TOUJOURS PLUS INTENSE.
Cette spirale guerrière succède à des crises de vaste ampleur, qui ont secoué l’économie globale durant les dernières décennies.
Certes, la production et les échanges sont pleinement intégrés à l’échelle planétaire, l’économie mondiale fonctionnant comme un tout. Cette interdépendance s’est illustrée encore récemment par la pénurie de composants électroniques depuis 2020 et les tensions sur les combustibles consécutives aux sanctions contre la Russie.
Mais sur la scène internationale, chaque fraction du capital est organisée autour d’États nationaux ou de coalitions d’États, qui sont tous concurrents, sinon ennemis. Ils sont tous confrontés à la stagnation économique qui affecte l’économie depuis plusieurs décennies et, par suite, ils sont tous portés à s’affronter pour le contrôle des marchés, de la main-d’œuvre, de la technologie et des matières premières.
POUSSÉES PAR LE DÉSORDRE IMPÉRIALISTE, LES CLASSES CAPITALISTES SONT AINSI PIÉGÉES PAR LEUR PROPRE LOGIQUE QUI LES CONTRAINT À LA GUERRE COMME MOYEN ULTIME POUR SATISFAIRE LEURS INTÉRÊTS. CES GUERRES CAPITALISTES FONT PLANER LA MENACE D’UNE EXTINCTION DE TOUTE VIE SUR TERRE, ELLE-MÊME EN PROIE À UNE CRISE ÉCOLOGIQUE D’ENSEMBLE.
En France, nous subissons une campagne ininterrompue sur le thème du « nous sommes en guerre », réactivé avec la pandémie de Covid-19 et maintenant avec la crise ukrainienne. « Nous sommes en guerre, c’est un état de fait », déclarait encore Macron en septembre dernier. La ficelle est bien connue : cette rhétorique, à laquelle s’ajoute le projet de SNU et la propagande omniprésente dans la rue et les transports pour l’armée, n’est qu’une tentative grossière pour justifier l’unité nationale des exploités derrière leurs exploiteurs.
MAIS LA GUERRE ET LA MENACE DE SA GÉNÉRALISATION NE SONT PAS QUE DES ARTIFICES DE PROPAGANDE. ELLES DEVIENNENT UNE RÉALITÉ TOUJOURS PLUS PRÉSENTE DANS LES BASTIONS MÊMES DU CAPITALISME MONDIAL, DONT LES EFFETS PÈSENT SUR LA VIE DE MILLIONS DE PROLÉTAIRES.
Examinons cette tendance vertigineuse par deux illustrations : 1° le développement des budgets militaires et 2° la mise en place d’une économie de guerre.
1° Le développement des budgets militaires
Dans son discours du 20 janvier, Macron a rappelé l’effort de 295 milliards d’euros consacré à la dernière loi de programmation quinquennale afin de « réparer » les armées. Et d’être encore plus ambitieux en transformant les armées, grâce à la future loi de programmation militaire de 2024- 2030 « dotée de grands moyens et un effort budgétaire considérable : 413 milliards d’euros ». Ce qui est notable, c’est comme dans tous les pays la hausse régulière des budgets militaires en 20 ans : +17%.
La France n’est pas seule dans cette escalade mortifère. L’Allemagne et le Japon, les deux pays vaincus de la Deuxième guerre impérialiste qui jusqu’à présent défendaient une doctrine anti- guerre, symbolisent aujourd’hui le grand retour au réarmement. Tokyo vient d’annoncer un investissement de 315 milliards d’euros dans ses forces d’autodéfense, soit une augmentation de 50% par rapport à la période 2017-2022. Mais l’Allemagne elle aussi a effectué un virage total quand le Bundestag a voté une enveloppe de 107 milliards d’euros pour la Bundeswehr.
L’escalade des dépenses militaires totale au niveau mondial a de quoi faire tourner la tête. Parmi les nombreuses données du dernier rapport sur les dépenses militaires, publié lundi 25 avril par l’International Peace Research Institute de Stockholm (Sipri) : « en 2021, les dépenses militaires ont pour la première fois dépassé 2000 milliards de dollars dans le monde pour atteindre 2113 milliards de dollars (environ 1947 milliards d’euros), en progression de 0,7 % en terme réel par rapport à 2020, dont la moitié pour les membres de l’OTAN. Les cinq pays les plus dépensiers par ordre décroissant (États-Unis, Chine, Inde, Royaume-Uni et Russie) représentent 62 % du total – avec une domination américaine écrasante»1.
La Chine poursuit son effort pour aligner ses forces militaires sur sa puissance économique, avec un budget des armées de 293 milliards, soit un bond de + 72 % en dix ans. L’Inde, numéro 3 mondial, modernise son arsenal militaire en cherchant avant tout à développer une industrie militaire nationale et en y orientant les deux tiers de son budget, qui a atteint au total 76,6 milliards d’euros en 2021.
2° L’économie de guerre
La guerre en Ukraine percute toutes les économies nationales. Tous les équilibres économiques, financiers, monétaires et industriels sont bousculés. L’industrie militaire fonctionne à plein rendement pour approvisionner les fronts en munitions avec toutes les différentes catégories d’obus. Les stocks n’étaient pas prévus pour une guerre longue de « grande intensité».
Le président Macron a dernièrement lâché le terme « d’économie de guerre »2, qui a de nombreuses autres implications que la seule augmentation de la production d’armements. Selon Le Monde, « la direction générale de l’armement [en France] envisage par ailleurs de proposer un texte législatif qui permettrait de réquisitionner, dans certaines circonstances, des matériaux ou des entreprises civiles à des fins militaires. La plupart des entreprises de défense étant « duales », c’est-à-dire produisant également pour les besoins civils, ce texte, inspiré d’une législation américaine, leur permettrait de mobiliser leurs efforts vers la production militaire, sans que la France soit formellement en état de guerre. »
LES ÉTATS-UNIS, ONT PRIS UNE LONGUEUR D’AVANCE DANS LA GUERRE ÉCONOMIQUE ET LA MAÎTRISE DE L’ÉNERGIE, MAIS LA DOMINATION PAR LE FEU DEMEURE. Et pour cela il faut remettre l’industrie de mort en route. Déjà les États-Unis exportent 52, 5 milliards de $ d’armes soit autant que les autres grands pays vendeurs d’armes, ce qui permet de garder les entreprises qui travaillent pour l’armement en ordre de marche.
En Russie les entreprises du secteur militaro-industriel, selon leur patron Sergueï Tchemezov, travaillent 24 heures sur 24 et vont continuer de le faire en 2023. « Les entreprises impliquées dans les commandes publiques de défense travaillent jour et nuit et vont conserver ce régime l’année prochaine »3 . (Sergueï Tchemezov, patron de l’entreprise d’État Rostec qui regroupe les principales industries de haute technologie russes, en particulier dans le domaine de la défense).
Le prolétariat va payer cette épouvantable fuite en avant dans la guerre, en servant de chair à canon et dès à présent comme travailleurs exploités et pressurés par l’économie de guerre. L’OCDE a déjà chiffré « l’ampleur du choc de la guerre sur l’économie mondiale, l’OCDE a évalué à 2 800 milliards de dollars les pertes financières à anticiper l’an prochain (2023) par rapport aux prévisions antérieures à l’arrivée des chars en Ukraine »4. À un moment où les nuages noirs s’accumulent (crise économique, crise climatique, crise agricole, inflation), nous allons subir une baisse supplémentaire du PIB mondial dont dépend directement notre niveau de vie, ce qui accroîtra encore la misère de millions de personnes dans le monde.
Dans le même temps, les croque-morts sont déjà à l’œuvre. Le célèbre prédateur et fonds de pension BlackRock se porte candidat pour « aider » à la reconstruction de l’Ukraine. Définitivement, ce système est à abattre !
Alors, que pouvons-nous faire ?
La nécessité pour la bourgeoisie de développer l’économie de guerre, associée aux répercussions mondiales de celle-ci, conduisent à pressurer davantage les travailleuses et les travailleurs. Par suite, nous sommes contraints de nous mettre en mouvement pour défendre nos conditions de vie. C’est de cela que les États ont peur.
Aussi la période actuelle est-elle porteuse de dangers très graves, en même temps que d’un potentiel pour voir la classe ouvrière revenir sur le devant de la scène sociale et politique. On voit déjà comment les travailleurs sont attaqués partout dans le monde et comment ils ressentent la situation dans leur chair, les amenant comme au Royaume-Uni depuis l’été dernier à retrouver leur combativité.
Au bout du compte, seule une révolution peut mettre fin à un capitalisme moribond, qui peut encore être mortel. Les concessions, droits ou avantages obtenus dans l’intérêt des travailleurs sont déterminés par la lutte, le rapport de forces entre le prolétariat et la bourgeoisie dont les intérêts sont radicalement opposés. Rien n’est acquis : tant que le capitalisme durera, il cherchera à reprendre ce qu’il a été contraint de céder.
Il faut affirmer plus que jamais que seule la classe ouvrière peut mettre fin à cette barbarie. D’où le seul mot d’ordre à l’ordre du jour : révolution pour abattre le système et mettre fin définitivement à la guerre.
Cette issue est encore hors de portée pour une classe qui sort d’une longue période de repli et de recul de sa combativité. Cependant, nous ferions fausse route si nous jugions la situation à partir des luttes de la classe d’aujourd’hui. Face à l’intensification des cadences de production et aux restrictions de toutes sortes, les réactions ouvrières seront tout autres. Par ailleurs, les États vont se « blinder » (police, etc..) contre les populations, contribuant à dissiper les illusions démocratiques.
Il n’existe pas de raccourci, de solutions miracles ou « tactiques » de type électoral, parlementaire ou syndical, sur le chemin de la reprise de la lutte. L’histoire a largement montré que l’action indépendante de la classe ouvrière, au travers de ses propres organisations crées pour les besoins du combat et unissant le plus grand nombre de travailleurs en mouvement, est le levier du rapport de forces. Ces méthodes sont une boussole toujours actuelle pour orienter les militants issus de la classe et désireux de s’engager pour les intérêts à long terme de celle-ci.
Il y a urgence pour les internationalistes de s’organiser contre la guerre et les campagnes de la bourgeoisie pour nous faire accepter ses sordides intérêts ! A la perspective de guerre impérialiste, les révolutionnaires doivent opposer leur propre bannière : l’action révolutionnaire du prolétariat de tous les pays !
FACE À CES MENACES AUXQUELLES NOTRE CLASSE EST CONFRONTÉE, LA TENDANCE COMMUNISTE INTERNATIONALISTE DÉFEND L’INITIATIVE INTERNATIONALE NO WAR BUT THE CLASS WAR (NWBCW), QUI A ÉTÉ REPRISE PAR DES CAMARADES DU MONDE ENTIER. L’INITIATIVE NWBCW PEUT CONSTITUER UN POINT DE RÉFÉRENCE POLITIQUE OUVERT POUR TOUS CEUX ET CELLES QUI VOIENT LA NÉCESSITÉ DE LA LUTTE DES TRAVAILLEURS CONTRE LES ATTAQUES ÉCONOMIQUES DU CAPITAL ET SA DESCENTE DANS LA RIVALITÉ IMPÉRIALISTE, QUI N’ONT AUCUNE ILLUSION SUR LE PACIFISME OU LA POSSIBILITÉ DE PASSER PAR LES INSTITUTIONS CAPITALISTES POUR PRÉSERVER L’HUMANITÉ DE LA BARBARIE CAPITALISTE. L’AUGMENTATION DU COÛT DE LA VIE ET LA MILITARISATION GALOPANTE DEPUIS L’INVASION DE L’UKRAINE SONT DES EXPRESSIONS DE LA MÊME CRISE CAPITALISTE.
Si tu es d’accord avec cela, nous t’encourageons à prendre contact à l’adresse suivante : leftcom.org/en/contact ou par mail uk@leftcom.org
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