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théorie politique

Trois décennies d’horreurs capitalistes (1991-2022)

Publié le 17 Avril 2022 par pantopolis in Histoire

Dix ans de massacres en Syrie : 400.000 morts; toutes les puissances impérialistes ont apporté leur contribution à ce bain de sang.

Dix ans de massacres en Syrie : 400.000 morts; toutes les puissances impérialistes ont apporté leur contribution à ce bain de sang.

Trois décennies d’horreurs capitalistes (1991-2022)

Massacres guerriers, génocides, purification ethnique et explosion du nombre de réfugiés

 

À lire la presse ou à suivre les médias dits « libres », il n’y aurait pas eu de guerre en Europe depuis 1945. Pour ces journalistes idéologues patentés, l’Europe, sous la pax americana, c’est la paix, et le reste du monde c’est la guerre ! Un ignoble mensonge !

Les très sanglantes guerres de Yougoslavie (1991-2001)

Ces guerres de Vukovar jusqu’au Kosovo-Serbie – causèrent la mort de 140.000 personnes[1]. Le Centre de droit humanitaire estime que lors des conflits dans les anciennes républiques yougoslaves, au moins 130.000 personnes furent tuées. Peut-être 200.000 morts[2]. Avec le massacre à Srebrenica (Bosnie) de 8.000 hommes et adolescents « musulmans bosniaques » par l’armée serbe, en juillet 1995, le spectre du génocide est venu de nouveau hanter l’Europe[3].

Les bombardements du printemps 1999 exercés sur la Serbie ont été extrêmement meurtriers. Le maître d’œuvre en a été les USA et l’OTAN (France, Allemagne, Italie et Grande-Bretagne), avec la bénédiction idéologique du Vatican de Jean-Paul II, depuis 1991[4]. Les frappes, dites « chirurgicales », de l’OTAN firent « merveille » : 14.000 bombes, plus de 10.000 morts militaires, sans compter les civils serbes toujours comptabilisés comme victimes «colatérales»[5].

La Syrie si proche de l’Europe…

Rappelons aussi la guerre en Syrie depuis 2011, guerre loin d’être terminée. N’oublions pas que la distance à vol d’oiseau entre Larnaca (Chypre, membre de l’Union européenne) et Ţarţūs (base navale russe) est d’environ 206 kilomètres. Rappelons enfin que la Turquie eurasiatique est associée à l’Union européenne depuis 1963, qu’elle est liée à cette dernière par un accord d’union douanière depuis 1995. 

Le bilan humain a été bien plus lourd que pour l’ex-Yougoslavie. Treize millions de Syriens ont été contraints de fuir leur foyer au cours des dix dernières années. Cela représente plus de 60 % de la population. Sur ces 13 millions de personnes, 6,6 millions ont quitté leur pays, chiffre à peine au-dessus des 5 millions actuels de réfugiés ukrainiens (un bilan très provisoire). Près d’un réfugié sur 4 dans le monde est encore Syrien. La majorité de ces réfugiés syriens ont été accueillis par des pays de la région et l’Europe. La Turquie en a accueilli le plus grand nombre, suivie par le Liban, la Jordanie, l’Irak et l’Égypte. Le reste des réfugiés est dispersé dans d’autres pays d’Afrique, et plus d’un million a échoué en Europe, de la Grèce à l’Allemagne. Sept autres millions de Syriens sont des déplacés de l’intérieur du pays, ce qui représente – pour le moment ! – la plus grande population de personnes déplacées au monde[6].

Cette décennie de guerre en Syrie a fait près de 500.000 morts, dont 160.000 civils[7].

Il n’y a aucune grande puissance mondiale ou régionale qui n’ait du sang sur les mains dans ce conflit qui a touché autant la Syrie que l’Irak, de Raqqa à Mossoul (2016-2017). L’armée russe poutinienne a su appliquer à grande échelle sa science consommée des bombardements sur les populations civiles à Alep (2015-2016) et dans d’autres villes (région d’Idlib, 2019), au côté de Bachar-el-Assad, avant de redémontrer son savoir-faire en Ukraine. Les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France – au sein de la coalition internationale contre Daech qui rassemble nombre d’armées européennes, l’Australie, le Canada, l’Arabie saoudite, la Jordanie, le QatarBahreïn et les Émirats arabes unis ont bombardé la Syrie et le nord de l’Iraq. La Turquie, membre de l’OTAN, a bombardé, en octobre 2019,  les troupes kurdes en Syrie, après que Donald Trump les eut brutalement lâchées pour mieux les livrer à Recep Erdoğan … Les mercenaires russes (groupe Wagner) ou tchétchènes au côté de Daech, les milices iraniennes (au côté de la Russie) et kurdes (au côté des USA), les forces spéciales américaines, britanniques, françaises ont aussi apporté leur « contribution » à cet immense bain de sang qui a saigné à blanc pour des décennies la Syrie et le nord de l’Iraq.

L’agonie du Yémen

Zone stratégique entre la mer Rouge et l’océan Indien, où s’effectue 40 p. 100 du commerce maritime international et un quart du trafic des conteneurs[8], zone d’affrontement militaire entre l’Arabie saoudite, les Émirats, les USA (qui se sont retirés de la « coalition sunnite » en février 2021) face à l’Iran, pour le contrôle des routes pétrolières, le Yémen – ravagé par la guerre civile – a sombré dans un total chaos.

Commencée en juillet 2014, la guerre civile yéménite, qui dure depuis plus de sept ans, aura causé la mort de 377.000 personnes, victimes directes et indirectes du conflit, selon un bilan établi fin 2021.

Près de 60 % des décès, soit environ 227.000 personnes, sont dus aux conséquences indirectes du conflit, telles que le manque d’eau potable, la faim et les maladies[9]. À la fin de l’année 2021, les combats auraient fait 150.000 morts.

Et le pire est encore à venir : «1,3 million de personnes » sont menacées de mort si un accord de paix n’était pas conclu d’ici à 2030 : «Une proportion croissante de ces décès se produira… en raison des conséquences indirectes de la crise sur les moyens de subsistance, les prix des denrées alimentaires et la détérioration des services de base, tels que la santé et l’éducation »[10].

L’Afrique continent ensanglanté trop souvent oublié

Au moment même où débutait la guerre en Yougoslavie, une guerre ravageait la Sierra Leone entre 1991 et 2002 : elle allait tuer entre 50.000 et 200.000 personnes.

Aujourd’hui, du Nigeria au Burkina Faso[11], du Mali au Niger, une population déjà plongée dans la misère paye son tribut de sang dans une guerre livrée entre des Etats soutenus par l’impérialisme occidental et des groupes para-étatiques soutenus par l’Arabie saoudite, le Qatar, etc. Plus de 500 civils ont été tués par des islamistes armés dans la région africaine du Sahel depuis le début de l’année 2021.

Au Mali, sous couvert de « lutte contre le jihadisme », les forces militaires maliennes et des milices (Wagner), au service de l’impérialisme russe, ont perpétré une tuerie délibérée dans le centre du pays à Moura le 23 mars 2022. Celle-ci aurait fait entre 400 et 600 victimes selon «Libération»[12] et France Info, 6 avril 2022[13].

Depuis fin 2020, règne en Éthiopie une sanglante guerre civile où le pouvoir central dirigé par le prix Nobel de la paix (sic) Abiy Ahmed, devenu mène une guerre impitoyable contre sa population, en particulier le Tigré.

Un rapport d’Amnesty, intitulé “We Will Erase You From This Land” (« Nous vous effacerons de cette terre »)[14] donne un aperçu de la prose « humaniste» de ce Nobel, qui a érigé en règle générale le nettoyage ethnique :

Les autorités nommées par Abiy Ahmed dans l’ouest du Tigré et les forces de sécurité de la région Amhara voisine ont, avec la participation des forces fédérales éthiopiennes, expulsé plusieurs centaines de milliers de civils tigréens de leurs domiciles. Elles ont utilisé tous les moyens mis à leur disposition : homicides, viols, utilisation massive de la détention arbitraire, pillages, déplacements forcés, privation de toute aide humanitaire. Ces attaques systématiques contre la population civile tigréenne constituent autant de crimes contre l’humanité que de crimes de guerre à grande échelle[15]. Et cela dans l’indifférence totale des grandes puissances – Chine incluse dont le « soft power » s’exerce sur une bonne partie des économies africaines –, ainsi que des puissances régionales[16].

Au moins 108 civils ont été tués depuis janvier 2022 dans des frappes aériennes planifiées par le pouvoir central (Abiy Ahmed) dans la région du Tigré, l’ONU « évoquant de possibles crimes de guerre»[17].

Le Tigré est soumis  à un « blocus de facto » de l’aide humanitaire; il est donc condamné à la famine faute de nourriture et de de médicaments. Une situation qui n’est pas sans rappeler la situation en Ukraine, où l’armée de Poutine bombarde et bloque des villes stratégiques – comme Marioupol (430.000 habitants) – jusqu’au point où la famine devienne une arme de destruction massive.

 

[1] Données établies par l’International Center for Transitional Justice, New York. Cette ONG, fondée en 2001, se consacre à « la poursuite des violations des droits de l’homme à travers des mécanismes de justice transitionnelle ».

[2] Voir site web du « Monde » : www.lemonde.fr/archives/article/2000/10/08/plus-de-200-000-morts-dans-l-ex-yougoslavie_3714990_1819218.html, Le Monde 8 octobre 2000.

[3] C’était un an après le massacre de 800.000 Tutsi au Rwanda (7 avril – 17 juillet 1994).

[4] Le Vatican a été un artisan clef de l’éclatement de la Yougoslavie en soutenant la sécession des régions catholiques de Croatie et de Slovénie.

[5] Les Échos, 4 juin 1999.

[6] https://news.un.org/fr/story/2021/03/1091792

[7] Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), in La Croix, 1er juin 2021.

[8] Le Monde, dimanche 18-lundi 18 avril 2022, p. 22.

[9] Rapport du 23 novembre 2021, établi par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

[11] www.hrw.org/fr/news/2021/06/08/le-burkina-faso-site-du-dernier-massacre-commis-par-des-islamistes-armes-au-sahel.

[12] https://www.liberation.fr/international/afrique/au-mali-cinq-jours-de-massacre-a-moura-20220403_ML5GR2ND3JH57BAWML5GHQ7W24/

[13] https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/mali/mali-pres-de-300-civils-auraient-peri-dans-le-massacre-de-moura_5065789.html

[14] « Crimes contre l’humanité et nettoyage ethnique dans la zone du Tigré occidental en Éthiopie » : https://www.amnesty.org/fr/documents/afr25/5444/2022/en/

[15] https://www.hrw.org/fr/news/2022/04/06/ethiopie-crimes-contre-lhumanite-au-tigre-occidental (6 avril 2022).

[16] « La réaction des partenaires internationaux et régionaux de l’Éthiopie n’est pas à la hauteur de la gravité des crimes qui continuent d’être commis dans l’ouest du Tigré », note la Secrétaire générale d’Amnesty International. 

[17] https://www.france24.com/fr/afrique/20220114-%C3%A9thiopie-plus-de-100-civils-morts-dans-des-frappes-a%C3%A9riennes-au-tigr%C3%A9-depuis-d%C3%A9but-janvier

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