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théorie politique

Une analyse du stalinisme

Publié le 17 Juin 2015 par Philippe Bourrinet

Un texte d'Agustín Guillamón

STALINISME

Le stalinisme fut une idéologie totalitaire, fondée sur le culte à Staline, qui utilisait un langage marxiste et se réclamait (et se légitimait) comme continuité des thèses de Marx, Engels et Lénine. À la mort de Staline, les dirigeants de l’État soviétique et du Parti Communiste de l’Union Soviétique (PCUS) critiquèrent les « déviations » provoquées par le culte à la personnalité de Staline. Le retour à une direction collective du PCUS et de l’URSS était suffisant (en 1956) pour résoudre les erreurs les plus graves du despotisme de Staline, dénoncées par Khrouchtchev au XXème Congrès du PCUS. Il suffisait aux héritiers de Staline, dans les années 50, d’introduire les principes démocratiques dans la direction collective du PCUS pour déclarer que tout était réglé.

Pour eux, Staline fut un phénomène monstrueux, mais ACCIDENTEL, et en tout cas les manifestations perverses du système stalinien, dues au culte de la personnalité, s’estompaient et rapetissaient face aux « glorieuses réussites » du système soviétique. Les erreurs et les horreurs de Staline se limitaient, selon les héritiers et successeurs staliniens, à la période qui allait depuis le début des années 30 jusqu’à sa mort en 1953. Ce fut l’explication des staliniens sans Staline, qui ne convainquit personne, mais qui servit à tous pour faire retomber les fautes d’un régime totalitaire, anti-prolétarien et oppresseur sur un seul individu, et pour enterrer toute la période stalinienne sous le couvercle de l’oubli, de l’amnésie et du palimpseste, c'est-à-dire de la « correction » continue et opportuniste de l’histoire. Les caractéristiques de la contre-révolution stalinienne furent :

1.- Terrorisme politique incessant, omniprésent et quasi omnipotent.

2.- Indispensable falsification de sa propre nature contre-révolutionnaire, et de la nature de ses ennemis, spécialement des révolutionnaires.

3.- Exploitation des travailleurs à travers un capitalisme d’État, dirigé par le Parti-État, qui militarisa le travail et appliqua la terreur étatique à la vie quotidienne.

L’isolement de la révolution russe, unie aux catastrophes de la guerre civile, au chaos économique, à la misère et à la faim, magnifièrent les terribles erreurs des bolcheviques, parmi lesquelles se détachait l’identification entre Parti et État, qui conduisirent au triomphe inévitable de la contre-révolution stalinienne, depuis le sein du propre parti bolchevique, qui avait impulsé la révolution soviétique d’Octobre 1917.

La contre-révolution stalinienne fut donc de caractère politique, elle détruisit toute opposition politique et idéologique, elle réprima durement mouvements et groupes prolétariens, indubitablement révolutionnaires, et persécuta jusqu’à l’extermination physique ceux qui manifestèrent la moindre dissidence, que ce soit à l’intérieur ou en dehors du parti unique bolchevique, et elle se nicha dans le monopole du pouvoir par le propre parti bolchevique, dans les mesures de nationalisation et de concentration économique étatique (capitalisme d’État) et dans la transformation du Parti bolchevique en un Parti-État, dirigé par le Comité Central d’un parti unique, soumis à la tyrannie de son secrétaire général et père de la patrie. La précoce et adroite critique anarchiste du léninisme et du stalinisme se rencontre dans la théorie et la pratique des anarchistes et des anarcho-syndicalistes espagnols des années 30, qui dénoncèrent à la racine les conceptions et dérives totalitaires de la révolution russe.

L’insurrection prolétarienne de mai 1937 fut le premier soulèvement ouvrier contre les staliniens (et le gouvernement catalan de la Généralité). Quelques théoriciens marxistes critiquèrent également le léninisme et le stalinisme depuis ses origines, fondamentalement depuis le conseillisme: Gorter, Pannekoek, Korsch. En 1956 les tanks russes écrasèrent le soulèvement des travailleurs hongrois, en 1968 celui du peuple tchécoslovaque. En chacune de ces occasions, les intellectuels bourgeois reniaient leur passé stalinien.

Le retard économique du capitalisme d’État soviétique, les timides réformes politiques, les aspirations nationalistes et la tyrannie exercée par le parti unique sur la vie militarisée des travailleurs produisirent entre 1989 et 1992 la chute du système stalinien dans toute l’Europe, ce qui provoqua la disparition de l’Union Soviétique, remplacée par une multitude de nouveaux États. Il n’y eut jamais un passage du communisme au capitalisme parce qu’en Union Soviétique et dans les autres pays staliniens il n’avait jamais existé une société ou une économie authentiquement socialistes.

Il se produisit seulement une modernisation du capitalisme « d’État », qui adopta sans trop de difficultés les formes politiques te économiques du capitalisme « de marché » occidental, convertissant en multimillionnaires les vieux bureaucrates et les maîtres de l’appareil étatique et du parti unique.

Agustín Guillamón.

Traduction de CATSCAEN (juin 2015)

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